vendredi 23 novembre 2018

COMMUNIQUE DE PRESSE : Pourquoi la situation du marché de la turbine à gaz n'est pas si noire que l'on veut nous le faire croire ?


Pour les dirigeants de GE turbines à gaz, le marché semblerait être la cause de tous nos maux et face à cette fatalité, nous ne pourrions que préparer des solutions d’adaptation drastiques.

Nous ne sommes pas des devins mais devant ce pessimisme insistant sur le futur du marché, nous nous devons de réagir et donner une vision plus réaliste.

En ce qui nous concerne, nous sommes convaincus que les turbines à gaz sont une dimension incontournable du mix énergétique et que les besoins qui ont stagné ces dernières années sont en train de repartir à la hausse. 

1 – Un marché de l’énergie électrique structurellement à la hausse

Tout d’abord, il y a une corrélation importante facilement compréhensible entre l’accroissement de la population et celui du marché de l’électricité.

On constate également un deuxième phénomène qui est l’électrification de nos sociétés.

L’augmentation est forte dans les pays émergents et on constate que la consommation électrique repart à la hausse dans les pays industrialisés après une période de baisse due à la crise financière et les premiers efforts d’efficacité énergétique (+1,6% entre 2016 et 2017 – source ENTSO, regroupement de transporteurs électriques européens)

2 – Un besoin fondamental de sources d’énergie pilotables sur le réseau

Si les prix des renouvelables ont énormément baissé ces dernières années et constituent aujourd’hui la majeure partie des MW installés dans le monde, cette progression va se heurter à des effets de seuil que sont : l’empreinte au sol très importante, le transport couteux de l’électricité vers les centres de consommation et les fortes contraintes sur la gestion et la stabilité des réseaux électriques notamment du fait de l’intermittence de ces moyens de production.

Le cas de l’Allemagne est révélateur : nous voyons depuis 4 ans un très net arrêt de la pénétration du renouvelables autour de 20%. Nous constatons d’ailleurs un effet similaire en Italie mais vers 15%.

On voit également partout en Europe une reprise des heures d’utilisations des centrales gaz. Et ceci n’est pas contradictoire avec une surcapacité installée en Europe estimée à 36%, nécessaire justement pour couvrir les productions intermittentes. 

3- Un marché des turbines à gaz neuves qui est toujours là

Comme le montrent les appels d’offres sur des mega-deals (commande de l’ordre du GW) en Egypte, au Bangladesh, en Irak pour ne citer que les plus récents, il y a toujours des affaires à faire, car seule la technologie turbine à gaz peut permettre d’alimenter en électricité des bassins de plusieurs centaine de milliers de personnes en un temps record.

Pourquoi notre compétitivité s’est érodée sur ces marchés ? Peut-être parce que cela implique un investissement significatif dans l’outil industriel pour le maintenir productif et créatif, et ceci au détriment d’une rentabilité rapide pour l’actionnaire.

Les salariés défendent le fait que nous pourrons mieux résister à des conjonctures temporairement défavorables si nous revenons à une gestion industrielle de notre entreprise. Nous devons cesser de redistribuer plus à nos actionnaires que nos bénéfices nous le permettent et consacrer une grande partie de ces résultats pour remettre l’outil productif de Power sur les rails.

4 – Une flotte installée considérable pour le marché très lucratif de l’après-vente

La flotte installée des machines GE représente plus de 50% du parc gaz mondial, soit plus de 7000 machines réparties dans le monde. Elle nécessite un support considérable et draine un flux financier très important vers la filière gaz qui représente 60% des revenus de Power, soit plusieurs milliards de profit.

Les difficultés actuelles sur les produits neufs sont majoritairement liées à de mauvaises stratégies et modalités d’exécution décidées au niveau du groupe.

Les équipes de Belfort sont encore majoritairement constituées des personnes qui ont fait le succès de ce business par le passé. Les salariés du gaz ont du travail et un avenir à Belfort si on les laisse exprimer leur savoir-faire et leur expérience, si on leur en laisse les moyens.

5. Un marché 50 Hz qui résiste contrairement à l’effondrement du marché 60 Hz

Le marché de la turbine à gaz est réparti en 2 segments totalement indépendants :

- le marché 60 Hz, pour lequel les turbines sont fabriqués au Etats-Unis (Turbines 7E, 7F, 7H)
- le marché 50 Hz, pour lequel Belfort est le centre mondial de la fabrication (Turbines 6B, 6F, 9E, 9F, 9H)
Le marché du gaz au premier semestre 2018 est en baisse de 20% comparé au 5 dernières années mais :

Marché 50 Hz : baisse de 4 % (29,8 GW en moyenne de 2013 à 2017 pour 14,5 GW au premier semestre 2018)

Marché 60 Hz : baisse de 57% (15,2 GW en moyenne de 2013 à 2017 pour 3,3 GW au premier semestre 2018)

Dans un marché qui se retracte autour du 50 Hz, la logique industrielle voudrait que les activités se centralisent sur Belfort, centre mondiale 50 Hz, qui a une longue expérience, une expertise reconnue et une connaissance accrue des marchés, des clients ainsi que des turbines développées pour le marché 50 Hz, qui a représenté plus de 80% des ventes, au 1er semestre 2018.

Contrairement à sa communication, le problème de GE POWER n’est ni le marché ni l’acquisition ALSTOM mais :

-  les promesses inconsidérées auprès des actionnaires en décalage avec la réalité du marché,

- la surévaluation de la valeur de ses acquisitions comme ALSTOM dont les performances industrielles et financières étaient parfaitement connues, au moment du rachat,

- la dégradation des ses performances commerciales caractérisé par la baisse de 50% à 20% des parts de marché de GE sur le premier semestre 2018, due à un manque d’investissement dans les segments de marchés intermédiaires et du transfert des activités commerciales dans des régions qui ne connaissent ni produits, ni les marchés au regard des écarts de plus en plus important entre les prévisions et la réalité du marché.

En Mars 2017, Steve BOLTZE, ex-Patron de GE POWER qui visait la succession de Jeff Immelt, pariait sur une augmentation inconsidérée du marché de 48 GW à 70 GW, alors qu’il y avait déjà des surcapacités de production, une explosion du renouvelables et qu’ALSTOM ne représentait 4% des parts de marché de la turbine à gaz.

Et 6 mois plus tard, on nous parle d’un « retournement » du marché : nos clients auraient-ils découvert l’existence des énergies renouvelables durant l’été 2017 ? comment des équipes commerciales maintenant au plus proche du client n’ont pas vu ce changement ? 

En effet, GE prévoyait de vendre et produire 24 turbines 9HA par an, soit environ 12 GW alors que les experts les plus optimistes prévoyait que le segment H du marché 50 Hz ne représente pas plus de 10 GW. Comment peut-on parier sur 120% de part de marché sur ce segment ? 

Comment GE peut-il déprécier ses actifs dans GE POWER de 23 Milliards de dollars alors qu’il a fait l’acquisition d’ASLTOM à hauteur de 12 Milliards et que les performances d’ALSTOM sont meilleurs que lors de son rachat ? 

En conclusion, cette tribune a pour intention de créer un débat sur la présentation pessimiste du marché qui justifierait en grande partie la stratégie actuelle du groupe. Or comme la presse spécialisée s’en ait fait l’écho, nous ne pouvons plus ignorer que ces décisions sont en fait toujours basées sur la rentabilité à court terme de l’action qui détruit tout avenir indutriel.

Le groupe ne cherche-t-il pas à affaiblir délibérément Belfort pour demain expliquer l’obligation de restructurer (c’est-à-dire réduire les effectifs).

La presse doit-elle préparer son prochain reportage sur les conséquences désastreuses d’une gestion étrangère et financière sur un autre fleuron industriel français ?

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